Photographie de Coralie Honnorat : Lueur - St Mandrier sur mer

La photographie intitulée **« Lueur »**, capturée à St Mandrier sur mer par Coralie Honnorat, est une œuvre fascinante où la nature et la lumière dialoguent dans une mise en scène qui n’est pas sans rappeler les grands principes du romantisme et les jeux de clair-obscur de la peinture classique.

D’emblée, le spectateur est happé par la force du contraste : la silhouette sombre de l’arbre vient trancher, presque violemment, sur ce halo lumineux intense, à la frontière du surnaturel. Ce choix compositionnel ramène immédiatement à la tradition picturale du **ténèbrisme**, initiée par Caravage, où la lumière devient protagoniste du drame visuel. Ici, la lumière, loin d’être diffuse, s’immisce entre les branches, jaillit du tronc tel un cœur incandescent, et ramène à la célèbre variation sur l’« inachevé » chère au romantisme allemand, notamment chez Caspar David Friedrich.

Le traitement de la lumière opère un effet sublimatoire : elle ne se contente pas d’éclairer, elle semble transfigurer le paysage. La brume dorée, éthérée, enveloppe la scène d’un voile mystérieux, presque onirique, donnant à l’image un aspect de vision intérieure, plus que de simple représentation du réel. Cette approche rappelle la quête de l’ineffable présente dans l’œuvre de Turner, où la lumière devient symbole du sublime, du dépassement, voire de la révélation mystique.

La composition, quant à elle, n’est pas anodine. L’arbre, bien qu’au centre, n’écrase pas l’espace : ses branches s’ouvrent en éventail, laissant filtrer la lueur – une invitation à la contemplation, à l’introspection. Il y a dans ce cadre volontairement déséquilibré, dans la tension entre l’ombre et la lumière, une réminiscence de la photographie pictorialiste du XIXe siècle, où la nature était sublimée à l’aune de l’émotion ressentie, et non simplement observée.

On notera aussi le silence visuel de l’œuvre, son économie de détails anecdotiques : Coralie Honnorat épure, synthétise, pour ne retenir que l’essentiel où la sobriété du cadre invite à une méditation sur la trace et l’impermanence.

Enfin, le titre même, « Lueur », accentue cette dimension liminale : il ne s’agit ni du plein jour, ni de la nuit, mais de cet entre-deux fugace où tout semble possible. L’image s’ouvre ainsi à la projection du spectateur, à sa propre expérience intime du mystère et de l’espérance, dans cette lumière qui transperce la nuit.

Au final, Coralie Honnorat livre ici bien davantage qu’une simple photographie de nature : elle propose une expérience sensorielle et spirituelle, où la lumière devient matière vivante et l’arbre, une figure tutélaire de la résilience et du possible. Une œuvre à la fois classique dans sa maîtrise des codes et résolument moderne dans son invitation au silence et à la contemplation.

HONNORAT Coralie - Lueur - St Mandrier sur mer (Photographie) - ART ET MISS

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